Ainsi donc, le président de la République a déclaré que si la ligne rouge avait été franchie par le régime syrien de Bachar al ASSAD, il « prendrait ses responsabilités ».
Cette “ligne rouge” est l’utilisation d’armes de destruction massive, en l’occurrence l’arme chimique. Il est vrai qu’au regard de l’Humanité, l’emploi de telles armes “inhumaines” fait nombre de victimes “civiles”, de façon indifférenciée, lors de frappes qui sont tout sauf “chirurgicales”. Beaucoup de guillemets en effet.
Tout d’abord, il convient de faire observer à notre président qu’à tracer une ligne rouge menaçante, il se place dans la situation de se faire abuser par toute organisation opposée au régime de Bachar al ASSAD qui perpétrerait l’acte afin de lui faire porter la responsabilité de l’horreur. Car dans cette sale affaire de la Ghouta, on se demande bien quel intérêt aurait eu le régime syrien, surveillé comme il est par toutes les agences notamment occidentales, à utiliser ces armes chimiques alors que sa victoire sur le terrain est acquise ? Et quel manque d’autorité et de clairvoyance de la Russie comme de l’Iran vis-à-vis de leur protégé ! En fait il faut bien sûr se demander à qui profite le crime ? A l’évidence pas au dirigeant syrien, pas aux mollahs iraniens, pas à Vladimir POUTINE. Alors à qui ? Au nouveau sultan d’Istanbul ? Aux opposants rebelles au régime de Damas qui ne se privant pas d’utiliser les civils comme bouclier humains pourraient tout aussi aisément décider d’en gazer quelques centaines pour “la bonne cause” ? Liste non exhaustive.
Ensuite, bien qu’il ne l’ignore pas, il convient de rappeler à M. MACRON que si l’article 16 de la Constitution l’autorise à « prendre les mesures exigées par les circonstances » dans le cas où « l’exécution des engagements [de la France] sont gravement menacés » cela ne vise en aucun cas une quelconque “ligne rouge” qu’il aurait individuellement tracée.
De même, il faut aussi lui préciser que l’article 35 du même texte et les préambules de 1946 et 1958 ne l’autorisent à une utilisation des forces sur un théâtre extérieur que dans les cas très précis d’actions de sécurité collectives conduites dans le cadre du chapitre VII de la Charte des Nations Unies (Golfe I, Bosnie, Libye) ou à la demande expresse d’un pays ami sur son territoire (Tchad, Mali) ou encore, hors cadre constitutionnel pour une action ponctuelle urgente de sauvetage de ressortissants français gravement menacés (Kolwezi 1978). Rien de tout cela dans l’affaire de la ligne rouge syrienne.
En fait, en l’absence de preuves indiscutables, présentées au peuple français, sur la réalité et l’origine de l’attaque chimique invoquée, on est en droit de se demander si le locataire de l’Elysée n’utiliserait pas à son profit l’une de ces fausses nouvelles qu’il dénonce par ailleurs. Nous avons tous en mémoire l’image TV de Georges W. BUSH, Tony BLAIR et Colin POWELL affirmant l’existence de WMD (weapons of mass destruction) en Irak aux mains de Saddham HUSSEIN pour justifier la seconde guerre du Golfe. Ils avaient l’air que tous les parents connaissent sur le visage de leur enfant quand il ment effrontément. Et de fait, le Monde attend encore et pour longtemps la moindre preuve de l’existence de ces armes de destruction massive irakiennes… L’objectif était tout autre.
Tout comme aujourd’hui.
Un article très intéressant de Caroline GALACTEROS dans le Figaro Vox du 11 avril 2018 («Pourquoi la France ne doit pas s’associer aux frappes en Syrie» http://www.lefigaro.fr/vox/monde/2018/04/10/31002-20180410ARTFIG00277-pourquoi-la-france-ne-doit-pas-s-associer-aux-frappes-en-syrie.php via @FigaroVox) nous apprend que l’Allemagne de Mme. MERKEL, pour complaire à l’Ukraine, vient de s’opposer au tracé NordStream 2 du gazoduc russe vers l’Europe. La Russie devra ainsi contourner par le Sud (tracé SouthStream) à un coût bien supérieur, via la Turquie ou la Syrie…
En prenant un peu de hauteur, tous ces événements récents – affaire Skripal (l’espion double russe, donné pour mort mais ressuscité, il faut dire que c’était à Pâques…) conduisant aux expulsions coordonnées de diplomates russes par les pays occidentaux, sanctions contre la Russie, blocage de la délégation sportive russe aux J.O. d’hiver en Corée du Sud, blocage de NordStream 2, mise en cause de la Russie dans l’affaire de la Ghouta – ne vont que dans un même sens : pousser – au profit de qui ? – l’ours russe à la faute.
Mais si faute il devait y avoir, ce serait celle de M. MACRON, pour cause de “franchissement de ligne rouge”, s’il devait se comporter comme le caniche des anglo-saxons et de l’OTAN.
La place particulière de la France dans le Monde, sa Constitution, son histoire millénaire, la doctrine gaullienne de non-alignement et de refus du “choc des civilisations”, l’exigence liée à son statut de membre permanent du conseil de sécurité de l’ONU – statut obtenu de haute lutte par le Général DE GAULLE eu égard aux sacrifices innombrables consentis par le peuple français et par sa détermination à doter notre pays de l’arme nucléaire, commandent de ne pas attaquer militairement et unilatéralement, sans mandat de l’ONU, le régime légal souverain de Bachar al ASSAD en Syrie.
Patrick MIGNON
Vice-président de Debout La France