Dominique Jamet, vice-président de Debout la France depuis 2012 mais également journaliste depuis… toujours tiendra désormais chaque semaine sur notre site une chronique où il commentera très librement l'actualité politique.
On ne prend pas les mêmes !
Ce ne sont pas précisément des débutants. Ni des inconnus. Ni des perdants de l’année. Le premier, qui se présente depuis hier comme le président de tous les Républicains, était encore, il y a trois ans seulement, président de la République française. Le second, qui fut le prédécesseur de Martine Aubry, de Harlem Désir et de Jean-Christophe Cambadélis à la tête du Parti socialiste est encore, normalement, chef de l’Etat pour vingt-quatre mois…
Pourtant, lorsqu’à la veille du « Congrès refondateur »qui doit procéder au ravalement de façade d’une UMP vieillie avant l’âge, Le Parisien publie les résultats d’une enquête d’opinion, il apparaît qu’à la question : « Souhaitez-vous que Nicolas Sarkozy se présente à l’élection présidentielle de 2017 ? « 72% des sondés répondent négativement. Ils étaient 77%, il y a quelques jours, qui rejetaient également l’éventualité d’une candidature de François Hollande à un deuxième mandat.
Si l’on prend ces sondages par l’autre bout, compte tenu des 2% qui ne se prononcent pas, 26% seulement des Français souhaitent voir Sarkozy tenter de nouveau la chance qu’on lui a déjà donnée en 2007, et 21% envisagent sans déplaisir que M. Hollande sollicite la prolongation de son bail. Telle serait dans la l’hypothèse la plus favorable la base de départ des deux personnages qui prétendent une fois de plus rentrer dans l’histoire l’un par la grande porte de droite, l’autre par la grande porte de gauche. Et je dis bien « dans l’hypothèse la plus favorable » car, étant donné le libellé de la question posée par l’institut de sondages, il faut défalquer des scores respectifs obtenus par les deux champions les voix des électeurs de droite qui souhaitent que Hollande soit candidat parce qu’il est la meilleure chance de Sarkozy comme celles des électeurs de gauche qui voudraient que Sarkozy se présente parce qu’il est la meilleure chance de Hollande.
Faut-il rappeler que lorsqu’il n’obtint au premier tour de l’élection présidentielle de 1965, la première organisée dans le cadre du suffrage universel sous la Ve République, que 45% des voix, De Gaulle, s’estimant désavoué, songea très sérieusement à ne pas affronter l’humiliation d’un second tour ? Faut-il rappeler qu’en avril 1969, lorsque 52% des Français répondirent « non » à un referendum où sa personne n’était pas formellement engagée, puisqu’il ne s’agissait que d’approuver ou de rejeter la réforme du Sénat, le général rendit publique dans l’heure sa décision irrévocable de quitter son palais et ses fonctions ? Oui, il faut rappeler cette leçon de dignité et de respect de la démocratie qui semble avoir été perdue par ses successeurs, aussi bien celui qui porta une atteinte criminelle aux droits du peuple souverain en bafouant la volonté clairement exprimée par les électeurs lors du referendum de 2005 que celui qui, accroché à sa légalité comme un naufragé à une bouée de sauvetage, ignore la perte de légitimité qui lui a été signifiée par les votes exprimés aux municipales et aux européennes de 2014, aux départementales de ce printemps et qui lui sera répétée, voire aggravée, en décembre prochain.
L’enseignement des deux sondages parus à quelques jours d’intervalle dans Le Parisien est pourtant assez clair : « Vous ne nous aurez pas une seconde fois. On vous a essayés, on vous a testés, on vous a rejetés. Comment Hollande pourrait-il être l’homme du changement ? Comment Sarkozy pourrait-il être l’homme du renouveau ? On ne veut plus de vous. On ne prend pas les mêmes et on ne recommence pas. » Sont-ils à ce point durs d’oreille, sont-ils à ce point prisonniers de leur ego et de leur cour que le cri du peuple ne parvient pas jusqu’à eux ? Il n’est pire sourd que celui qui ne veut pas entendre.
Dominique Jamet