L’annonce d’une taxation de 3% des activités des “géants du net” américains par l’Union Européenne a fait l’objet d’une suite de communications malheureuses et précipitées qui ont interrogé bon nombre de nos compatriotes sur le sort réel réservé aux multinationales qui exploitent leurs données personnelles.
Tout d’abord, rappelons que la dépendance totale des pays européens envers ces multinationales américaines est due à l’absence de politique volontariste menée en France et chez nos partenaires pour faire émerger des concurrents crédibles. Il faut dire que l’Union Européenne, en interdisant toute politique industrielle nationale et européenne depuis les années 1990 au nom de la concurrence libre et non faussée est largement responsable de cette catastrophe. Pendant que les Etats-Unis finançaient directement ou indirectement leurs champions numériques à coups de milliards de dollars, la France avait ses pieds et poings liés par Bruxelles.
La France et les autres pays de l’Europe se sont fait piller des idées et se sont laissés dépasser par la “digitalisation grand public” américaine tout en subissant l’omniprésence et la nécessité d’utilisation de ces services mondialisés. Ils ont abandonné l’idée d’être des acteurs prépondérants du numérique aux Etats-Unis alors que la Chine ou la Russie ont su développer leurs propres modèles.
Cette situation monopolistique est dangereuse et périlleuse car elle donne des pouvoirs démesurés à des sociétés privées étrangères qui accaparent nos informations et nos données personnelles, hautement monnayables, permettant de tout connaître en termes de goûts, d’activités, d’humeur voire même de santé.
Cette colonisation numérique de la France et de l’Europe par les Etats-Unis est aujourd’hui une réalité, elle n’est cependant pas immuable. Souvenons-nous que les Etats-Unis disposaient de la même domination sur nombre de technologie (aviation, énergie, espace…) et que des projets volontaristes en France et en Europe ont pu rattraper le retard et regagner de l’avance. Hélas, la situation est d’autant plus préoccupante que nos dirigeants et ceux de la Commission Européenne ne manifestent aucune volonté de redevenir indépendants !
Si les premières mesures fiscales prises par l’Union Européennes sont un bon début, ce choix « punitif » contre les GAFA et consorts ne peut préserver la liberté et les droits de nos concitoyens sur le long terme. Une fois encore, Debout la France souhaite que l’Europe serve à bâtir de grands projets que la France peinera à mener seule. A ce titre, la création de champions numériques est prioritaire.
Par ailleurs, cette petite taxe de 3% ne fait que dissimuler le problème principal soulevé par l’évasion fiscale des multinationales du numérique : la présence au sein de l’Union Européenne de paradis fiscaux créant une concurrence fiscale intolérable. Tant que le Luxembourg, l’Irlande, les Pays Bas et d’autres pays européens continueront à offrir des régimes fiscaux qui permettent aux multinationales de frauder les autres partenaires européens, ces pratiques scandaleuses perdureront. Aussi il est indispensable d’imposer des règles loyales au sein du marché commun.
A ce titre, il est hors de question que la Commission Européenne manipule les déséquilibres fiscaux qu’elle a créés pour inventer une taxe qui prive les Etats de leurs ressources fiscales ! En effet, si les GAFA font de l’optimisation fiscale au Luxembourg sur le dos des contribuables français, la part récupérée par la Commission Européenne doit revenir au budget de la France, et non au budget de Bruxelles.
Or les propos malheureux du Président Emmanuel MACRON ont associé cette nouvelle taxe des 3% à une compensation des pertes de continuations financières du Royaume Uni au budget européen ! Ce sont donc encore les contribuables français, qui seront doublement lésés, d’abord par l’optimisation fiscale des GAFA puis par la confiscation par Bruxelles du produit de cette taxe compensatoire ! Au lieu de pomper les richesses de ses membres, la Commission Européenne devrait faire de sérieuses économies !
Une fois encore, le modèle bureaucratique de l’Union Européenne crée plus de problèmes qu’il n’en solutionne ! Seul le passage à un modèle d’Europe des Nations, où les intérêts de chacun sont assurés pourra mettre au pas les pratiques déloyales des multinationales américaines tout en portant des projets volontaires pour lancer des champions européens assurant notre souveraineté numérique.
Lionel Mazurié
Délégué National au Numérique