Depuis lundi 11 mars, s’est ouvert à l’Assemblée nationale le débat sur le projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République. Vincent Peillon a présenté ce qu’était cette refondation en la rangeant sous l’égide de la philosophie du fondement de Descartes, demandant de dépasser les positions partisanes. L’enjeu que représente l’école mérite à n’en pas douter un vrai rassemblement. Mais la refondation proposée est-elle à la hauteur de son intention ?
Ses trois fondements sont : la priorité au primaire, la formation des enseignants et du temps accordé pour apprendre. Pour le primaire, il s’agira d’une réelle mise en œuvre du principe des cycles. Concrètement, il s’agit de la mise à mal de l’idée de progression pédagogique année par année, discipline par discipline. Ce fondement n’est qu’un retour à la loi Jospin de 1989 et à ses échecs ! Pour la formation des professeurs, il s’agira dans les ÉSPÉ (Écoles Supérieures du Professorat et de l’Éducation qui remplaceront les IUFM), de faire partager des visions communes à tous les professeurs, de maternelle ou de l’Université. Or, enseigner à la maternelle n’est déjà pas le même métier qu’enseigner en élémentaire ! Ce fondement est un retour pur et simple au dogme constitutif des IUFM, qui donna lieu aux formations les plus dénuées de sens qui aient jamais existé. Pour laisser à chacun le temps d’apprendre, outre le problème des rythmes, V. Peillon n’a de meilleure idée que de s’attaquer encore au redoublement. Si les professeurs y sont attachés, il y a une raison. Il n’est pas vrai que toutes les études le condamnent comme inefficace. L’école ne saurait être une garderie où chacun passe dans la classe supérieure quoi qu’il fasse, ou ne fasse pas. L’école de la République doit être celle du mérite, garantir un niveau, ce qu’elle fait de moins en moins. S’en prendre au redoublement revient à attaquer l’exigence de l’école.
La « véritable révolution pédagogique » annoncée passe aussi par la formation au numérique par le numérique. Les technologies de l’information et de la communication pour l’enseignement (TICE) apparaissent comme la panacée pédagogique. Outre les coûts d’un tel parti pris, il est naïf de croire à l’eldorado numérique. Il n’est pas question de nier les formidables services que rendent les TIC. Mais une chose est l’usage qu’un esprit critique déjà formé peut tirer de tels outils, autre chose est la formation d’un enfant par le numérique. Les écoles de la Silicon Valley sont déjà passées au low-tech. On y sait mieux qu’ailleurs quelle est l’obsolescence du monde technologique. Une structuration de l’éducation par le numérique est-elle vraiment utile avant le lycée ?
M. Peillon entend re-fonder l’école de la République, il ne propose dans la précipitation du rythme quinquennal, qu’une réforme de plus. Il partage avec L. Jospin les mêmes préjugés, dogmes et parti pris. Précipitation et préjugé : les deux ennemis de la méthode cartésienne. Il est dommage qu’un philosophe l’oublie, il est dommageable pour l’Éducation nationale aujourd’hui que son ministre en reste là. M. Peillon se rêve en Jules Ferry, il n’est que l’ombre de Lionel Jospin.