L'un des principaux "arguments" -"prétextes" serait un terme plus approprié- avancés par les européistes pour justifier qu'on jette la France aux poubelles de l'histoire, est que notre pays serait trop petit, trop limité, voire déclinant, pour affronter les défis du XXIe siècle. Le temps de l'indépendance nationale serait passé, dépassé même. Il faudrait donc se rendre à la soi-disant évidence de l'intégration bruxelloise et de toutes ses belles promesses – bien qu'aucune n'ait été tenue depuis 25 ans!
C'est pourquoi il est jubilatoire de voir aujourd'hui, alors que la France s'apprête à exporter 24 nouveaux Rafale vers le Proche-Orient, le mutisme total des prescripteurs d'opinion supranationalistes. La réalité les rattrape et dément tout simplement de manière flagrante et totale tout ce sur quoi ils asseyent leurs fragiles et si péremptoires certitudes.
Que n'a-t-on entendu depuis trente ans, notamment dans leur bouche ? Que la France faisait preuve de chauvinisme, d'arrogance et d'irréalisme financier en fabriquant seule un avion de nouvelle génération que personne n'avait encore réussi à inventer. Qu'elle devait cesser de faire l'enfant et qu'elle rejoigne le programme Typhoon-Eurofighter, projet multinational conçu sur le modèle d'Airbus par la Grande-Bretagne, l'Allemagne, l'Italie et l'Espagne pour la production d'un chasseur innovant, déclinable à la carte. Les mêmes se sont longtemps esclaffés sur les retards du Rafale et, enfin, sur ses difficultés à s'exporter.
Ils levaient les yeux au ciel et haussaient les épaules lorsque, malgré tout, il leur était démontré la grande avance technique comme la maîtrise financière du Rafale : un avion unique en son genre -"omnirôle"-, une maniabilité parmi les toutes meilleurs au monde, une intégration technique et industrielle maximale qui en optimise le coût et les performances, une semi-furtivité appréciable, etc. Quant aux surcoûts du programme, ils furent des plus limités. Mais non, les censeurs de l'avion bleu-blanc-rouge n'en démordaient pas, l'accusant alors d'être "trop bon pour les besoins des pays clients"! S'il n'est pas pire que les autres, alors c'est qu'il était le meilleur, mais au sens péjoratif du terme ?
Mais tous ces « arguments » se sont brutalement effondrés en 2015 : l'achat de 24 appareils en février par l'Egypte a lancé le signal d'une cascade d'acquisitions, par l'Inde et maintenant le Qatar – en attendant la Malaisie, les EAU, voire la Belgique ou la Suisse, dont les électeurs ont rejeté par votation la préférence accordée par leur gouvernement au Gripen suédois… Chaque pays intéressé ne veut pas être en reste et devoir attendre de longues années avant d'être servi. La chaîne de production du Rafale est ainsi assurée pour plusieurs années, voire des décennies.
Pendant ce temps, son malheureux concurrent, l'Eurofighter, n'a pas tenu ses promesses malgré quelques réussites de prime abord, tant et si bien que sa chaîne de production risque fort d'être arrêtée d'ici à 2018.
Le Rafale fait partie des derniers feux de "Trente Glorieuses" dont il ne tient qu'à nous de faire revivre l'esprit, au plus grand bénéficie de l'indépendance et de la puissance nationales, comme du bien-être des Français. Cela implique de rompre avec les contraintes germano-communautaires suicidaires et de nous retrousser les manches pour bâtir une stratégie industrielle et scientifique ambitieuse et réaliste. Il existe des dizaines de secteurs où notre pays pourrait s'imposer, à tout le moins se faire une place enviable. Ce qui lui manque, contrairement à ce qu'affirment les européistes malhonnêtes, ce n'est pas une puissance irrémédiablement perdue, mais la foi en lui-même et le courage de vivre sa propre vie économique et monétaire, sans laquelle rien n'est possible.
Mais tout ne devra pas se faire dans des limites purement hexagonales, loin de là ! Le principe de coopérations libres et intelligentes avec nos voisins européens doit être cultivé et étendu. Pas n'importe comment ni sur n'importe quel projet, ainsi que l'ont démontré le succès du Rafale et l'échec du Typhoon. Mais sur des programmes mûrement réfléchis et efficaces, comme l'Airbus civil ou l'A400M (malgré de nombreux dérapages pour ce dernier), la société Eurocopter, et tant d'autres réalisations en cours ou à venir.
Car c'est bel et bien cela l'Europe, la vraie, celle qu'il nous faut enfin bâtir ! Et c'est tout le sens de l'Europe confédérale des coopérations à la carte que j'appelle depuis des années de mes vœux avec Debout la France. Une confédération européenne qui, j'en suis sûr, finira par s'imposer face au fiasco idéologique et suicidaire du fédéralisme germano-bruxellois, cette résurgence anachronique du despotisme éclairé de Frédéric II. Au bout de 25 interminables années d'intégration supranationale, notre continent s'enfonce chaque jour un peu plus dans le déni, l'erreur et le marasme. Vite, renouons avec le génie de nos nations pour enfin aller de l'avant!
Nicolas Dupont-Aignan
Député de l'Essonne
Président de Debout la France