Il y a quelques jours, le débat avait repris avec le dossier de Marianne, qui donnait la parole aux opposants à la monnaie unique. Il rebondit depuis une semaine avec la critique de Montebourg, l’étude du CAE sur sa dévaluation, l’étude sur la sortie des Pays-Bas et le jugement de la cour de Karlsruhe.
L’euro cher, une calamité pour l’industrie
Déjà, la politique de franc cher des socialistes au début des années 1990 avait envoyé un million de français au chômage. Il y a six ans, l’euro cher avait plongé les économies européennes dans une récession avant la crise des subprimes. Aujourd’hui, à 1,36 dollars l’euro, les industriels français tirent la langue, comme Thales qui a annoncé un plan de compétitivité pour y répondre : à 1,25 dollars, cela va, mais le cours actuel annule l’effort du CICE, comme le rappelle même Arnaud Montebourg. En fait, il y a 6 ans, Airbus avait été contraint d’acheter plus de pièces détachées aux Etats-Unis pour rester compétitif par rapport à Boeing, comme l’avait dénonce Louis Gallois, quand il était le patron de l’avionneur européen.
C’est ce qui a poussé le ministre du redressement productif à demander à ouvrir « une bataille politique pour faire baisser l’euro ». Si le constat n’est pas faux (notamment quand il dit que « nous sommes victimes d’une guerre des changes à laquelle nous sommes les seuls à ne pas réagir »), il est illusoire. La France n’a pas de moyen pour changer quoique ce soit à la gestion de la monnaie unique. Pire, il n’est pas le seul dirigeant à demander cela : Nicolas Sarkozy l’avait fait en vain lui-aussi… Mieux, une étude du CAE pour Matignon indique qu’une baisse de 10% de l’euro ferait progresser le PIB de 0,6% en un an et 1% en deux ans. Le moyen de clouer le bec à ceux qui caricaturent l’effet des dévaluations.
Quand la zone mark se rebelle
Capital Economics, un groupe de recherche respecté en Grande-Bretagne, qui avait gagné en 2012 le prix Wolfson pour le meilleur plan de démontage ordonné de l’euro, a publié une étude de 164 pages sur l’impact d’une sortie des Pays-Bas (Nexit). Les conclusions sont formelles, à mille lieues des prévisions délirantes des ayatollahs de l’euro : le PIB serait 10% plus élevé en 2024 et 13% plus haut en 2035. Voici une nouvelle pierre dans le jardin d’une Union Européenne de moins en moins populaire dans ce pays très endetté qui vit mal l’éclatement de sa bulle immobilière et est donc enclin à cherche une issue au marasme économique dans lequel il est plongé, tout en contribuant aux fonds européens…
Dernier événement : le jugement mi-figue, mi-raisin, de la cour de Karlsruhe sur le programme de rachat d’obligations souveraines de la BCE. Certes, elle demande l’avis de la Cour de Justice Européenne, faisant conclure un peu rapidement à Arnaud Leparmentier du Monde, que l’Allemagne se soumet à l’UE. Dans un papier autrement plus robuste dans la Tribune, Romaric Godin, soutient inverse puisqu’il note que la cour de Karlsruhe juge le programme non conforme aux traités, mais demande l’avis des juges européens tout en se réservant le droit de les censurer. C’est aussi l’avis du Spiegel, du Telegraph et de Magali Pernin. La foi européenne de certains journalistes leur fait perdre tout sens critique.
Le jugement de la Cour de Karlsruhe préserve les formes pour la BCE, au point de tromper les journalistes eurolâtres un peu superficiels. Mais sur le fond, ce sont les fondations mêmes de la monnaie unique qui vascillent, dans tous les pays. Dire qu’il en suffit d’un seul pour que le château de carte s’effondre…
Laurent Pinsolle
Délégué national à l’Equilibre des Comptes publics et au Patriotisme économique