Le rapport Lescure présenté ce lundi confirme les craintes exprimées par certains acteurs de l’économie du numérique et de la culture depuis plusieurs mois : ce n’est pas toujours dans les vieux pots que l’ont fait les meilleures soupes.
La mission menée par l’ancien président de Canal+ devait tracer les contours de l’exception culturelle française à l’ère du numérique. C’est un objectif louable et ambitieux qui exige de mener un véritable travail de prospective sur les technologies numériques, leurs usages et le rapport des français aux œuvres culturelles.
Mais force est de constater que le gouvernement socialiste dont les membres se montraient si critiques et diserts pour promettre de mettre fin à la politique réactionnaire du précédent gouvernement lorsqu’ils étaient dans l’opposition – je pense en particulier à Mme la Ministre Fleur Pellerin – sont redevenus des enfants sages. Très sages et très enclins à satisfaire les intérêts immédiats des microcosmes de la musique et du cinéma. Ceux-là même qui ont loupé le virage du numérique et s’obstinent à défendre un modèle économique d’un autre âge ont encore une fois été récompensés de leur travail de lobbying.
Sans être trop sévère quant à l’analyse lucide qui est faite des verrous actuels – chronologie des médias obsolète, lutte contre le piratage inadaptée, rigidité des droits d’auteurs – il faut bien reconnaître que l’exercice de prospective a été oublié et que les propositions ne sont pas à la hauteur, loin de là !
Car que dit le rapport Lescure ? Que la HADOPI, tant décriée à juste titre par une partie de la gauche lors de son instauration sous Sarkozy, n’était finalement pas une si mauvaise idée ! La commission Lescure se contente de proposer un rattachement au CSA, le censeur du XXème siècle !
Il faut ajouter à cela la création d’une taxe supplémentaire pour les terminaux mobiles qui abondera des fonds de financement de la culture – qui ne seront pas mieux gérés pour autant – et des subventions pour l’offre légale ! Taxes et subventions, une vieille recette éculée qui laisse envisager quelques années de stagnation de plus…
Car voilà le vrai drame : par leur lobbying intensif et leur sous-investissement dans le numérique, les acteurs de la culture ont privé la France d’un véritable levier de croissance pour son économie. Mais aussi – et surtout – ils mettent à mal notre politique d’exception culturelle qui aurait pu trouver dans le développement du numérique un relais inespéré. Alors qu’en 15 ans, le secteur numérique s’est hissé aux premiers rangs de l’économie mondiale notamment grâce à la culture (iTunes, Amazon), la France a manqué de réactivité et en est réduite à faire les poches de leaders américains en situation de monopole…
Mais soyons optimistes : tout n’est pas perdu. Nous ne sommes qu’aux aurores de l’ère numérique et nous pouvons rattraper notre retard en quelques années. Il est encore possible de profiter de la révolution numérique pour donner un nouveau souffle au rayonnement culturel de la France. Ne nous en privons pas !
Nicolas Dupont-Aignan propose depuis des années, dans la suite logiques de ses combats contre la DADVSI et la HADOPI, des solutions alternatives telles que la licence globale et la libéralisation des échanges numériques. En remplaçant les multiples taxes par cette licence globale et en cessant de s’épuiser à lutter contre le faux problème du piratage, les acteurs de la culture et du numérique disposeraient d’une véritable visibilité pour développer des offres payantes de qualité pour lesquelles les français sont prêts à payer.
Ce sont des questions d’avenir qui méritent un large débat. Que Mme Filippetti, Ministre de la Culture, lance un véritable Grenelle de la Culture Numérique avec l’ensemble des acteurs économiques et de la société civile, plutôt qu’une commission de vénérables éléphants.
Jean-Baptiste Raphanaud
Membre du Bureau national de DLR
Délégué national à la Révolution numérique