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L’ECOLE DE DEMAIN (7 juin 2016)
TABLE RONDE SUR L’AUTONOMIE DANS LE SYSTEME EDUCATIF
Avec Annie Genevard, députée et secrétaire à l’Education (LR), Bernard Hugonnier, ancien directeur adjoint de l’OCDE pour l’éducation, Dominique Reynié, directeur général de Fondapol, Pierre Barthe, spécialiste du système britannique
En présence d’Hervé Mariton député et ancien ministre (LR) et de Patrick Hetzel député, ancien recteur et directeur général au ministère de l’ESR (LR)
Je tiens tout d’abord à remercier SOS Education pour son invitation. Voilà bien une association qui accomplit une œuvre d’utilité publique et son succès n’est pas dû au hasard.
J’étais heureux que votre délégué général, Jean-Paul Mongin, puisse venir à la table ronde que nous avons organisée à nos dernières Universités de rentrée, sur la refondation de l’Ecole de la République, table ronde que nous avions placée sous le patronage de Jean-Pierre Chevènement.
En effet, sur cette question-clé pour l’avenir de notre jeunesse et de la nation, il doit y avoir une réflexion transpartisane. A défaut de consensus, une très large majorité doit se dégager.
J’aborderai rapidement devant vous le constat, largement partagé, je pense, puis j’évoquerai notre philosophie générale pour l’école de demain avant de vous donner notre position sur l’autonomie, une position qui risque naturellement de ne pas faire consensus avec Les Républicains et un certain nombre de personnes présentes à cette tribune.
Nous partageons, je le crois le constat de ce qui ne va pas. Au milieu de très nombreux échecs du gouvernement, celui sur l’école est l’un des plus nets. La succession de trois ministres de l’Education nationale en à peine trois ans le montre bien : Vincent Peillon, l’idéologue, Benoît Hamon, l’étoile filante, et Najat Vallaud-Belkacem, la communicante. Il faudra d’urgence prendre le contrepied des réformes du quinquennat :
- Le formatage des enseignants par les ESPE
- La réforme des rythmes scolaires en primaire
- La réforme du collège dans le secondaire
Je le dis tout net. Les ESPE doivent être réformées de fond en comble. Quant aux deux réformes, il faut les abroger. Les Républicains ne sont pas clairs dans leur volonté de le faire. Il est vrai que la Réforme Châtel du lycée annonçait d’une certaine façon la réforme du collège et les premières réactions de la direction du parti face à cette réforme avant repositionnement par tactique politique sont, de ce point de vue, significatives.
L’Education nationale, institution clé de la République doit redevenir le creuset de la nation. Cela passe par deux vecteurs fondamentaux à nos yeux.
1°) La restauration de l’autorité de l’enseignant qui doit être remis au centre du système à la place de l’élève comme tel est le cas depuis Lionel Jospin et des parents comme les socialistes en parlent aujourd’hui, même si ce même système doit associer, évidemment, toutes les parties prenantes.
2°) Nous considérons qu’à force de vouloir confier de plus en plus de missions à l’école, on finit par oublier que la première d’entre elles, est la transmission des connaissances. Il s’agit d’instruire et pas d’éduquer. Permettez-moi une incise. Ma délégation nationale s’intitule symboliquement « Instruction publique » comme le ministère de la rue de Grenelle, à l’âge d’or de la Troisième République et pas à l’ « Education ».
Aujourd’hui, je n’apprends rien à personne en disant que les savoirs fondamentaux ne sont plus maîtrisés. Il est capital de leur redonner une place centrale en terme de volume horaire, en primaire, comme dans le secondaire. Mais j’irai beaucoup plus loin et je serai sans doute plus radical que les membres de LR présents ici. Le socle commun des connaissances et des compétences doit être abrogé. Avec la loi Fillon de 2005 qui suivait les recommandations de l’OCDE et le processus de Lisbonne, tout en essayant de préserver l’essentiel, nous avions un plancher, un plus petit dénominateur commun. Je le dis tout net… une boîte de Pandore a ici été ouverte ! Avec le nouveau socle des connaissances, des compétences… et de la culture, de la loi Peillon nous avons désormais un plafond !
Nous ne voulons pas une école du renoncement qui délivrera un certificat d’employabilité à bas coût, une fabrique de producteurs-consommateurs formatés pour l’économie mondialisée. Nous voulons le meilleur pour notre jeunesse, une élévation du niveau par une école de l’exigence et du mérite. Nous voulons l’Ecole de la République !
Or, aujourd’hui, tout ce qui tend à élever est supprimé : internats d’excellence, bourses au mérite,… Tout ce qui nivelle est encouragé. Au nom de la lutte contre les déterminismes sociaux, chère à Bourdieu, on les renforce ! Les inégalités n’ont jamais été aussi fortes depuis 30 ans avec le recul de la part des jeunes des milieux modestes en prépas.
Venons en à la question de votre table ronde, l’autonomie dans le système éducatif.
Il est clair qu’il faut responsabiliser tous les membres de la communauté éducative, récompenser l’effort et le mérite de chacun et, en termes pédagogiques, encourager systématiquement les initiatives de terrain d’ordre méthodologique, face aux normes bureaucratiques, technocratiques et pédagogistes qui découragent les bonnes volontés et étouffent les projets réellement adaptés aux besoins. Les enseignants sont les meilleurs connaisseurs de leurs élèves. Pourquoi ne pas encourager aussi des établissements-pilotes dans chaque académie ?
Responsabilisation, confiance accordée aux acteurs, liberté dans la prise d’initiatives, récompense de l’investissement. Je crois que ce sont des éléments qui peuvent faire consensus entre nous.
Je risque cependant d’être la voix discordante par rapport à la plupart des intervenants, ici, aujourd’hui. En effet, nous considérons qu’il n’est pas possible de toucher à un certain nombre de points fondamentaux :
- La contrepartie de cette plus grande liberté doit naturellement être une évaluation régulière et fréquente de ces initiatives, en particulier les établissements pilotes. Seul l’Etat, garant de l’égalité républicaine peut être évaluateur.
- Les concours nationaux de recrutement, le CAPES et l’Agrégation, qui sont un gage de qualité et d’égalité républicaine doivent rester la base des recrutements et des affectations.
- Les programmes doivent aussi et pour les mêmes raisons demeurer nationaux.
- Il est impossible d’envisager une autonomie régionale ou départementale qui mettrait à bas plusieurs des principes fondamentaux de notre République : l’unité, la continuité et l’égalité de nos territoires.
Enfin 5) Les diplômes doivent rester, eux aussi, nationaux.
C’est sur cette base que nous souhaitons rassembler.
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