Le 24 octobre 2016 sera commémoré, comme chaque année, l’anniversaire de la Charte des Nations Unies, entrée en vigueur le 24 octobre 1945, l’ONU succédant à la SDN qui avait dramatiquement échoué.
1. État des lieux
1.1 Les Nations Unies s’organisent en 4 organes majeurs : l’Assemblée générale, le Conseil de sécurité (où la France, puissance nucléaire et de stature mondiale possède siège permanent et droit de veto), le Secrétaire général, la Cour internationale de justice.
Les Nations-Unies se sont aussi des Agences spécialisées comme la FAO (agriculture), l’OIT/ BIT (travail), l’ONUDI (industrie), l’OMS (santé), l’UNESCO (culture) et encore des offices chargés du programme mondial de l’alimentation ou de la question des enfants, des réfugiés, des droits de l’homme, et les forces d’interposition dans des conflits (casques bleus).
Les Nations Unies ont adopté des Conventions et Chartes célèbres, notamment sur les droits de l’Homme (avec le droit des peuples à disposer d’eux mêmes, inexplicablement absent d’une Convention européenne amputée de cet aspect essentiel).
1.2 Il est nécessaire de rappeler les objectifs de l’ONU figurant dans le préambule et les premiers articles de la Charte :
« préserver…/… du fléau de la guerre qui deux fois en l’espace d’une vie humaine a infligé à l’humanité d’indicibles souffrances,
« proclamer …/…notre foi dans les droits fondamentaux de l’homme, dans la dignité et la valeur de la personne humaine, dans l’égalité de droits des hommes et des femmes, ainsi que des nations, grandes et petites,
« créer les conditions nécessaires au maintien de la justice …/…et au respect du droit international
« favoriser le progrès social et instaurer de meilleures conditions de vie dans une liberté plus grande,…/…
« pratiquer la tolérance, vivre en paix l’un avec l’autre dans un esprit de bon voisinage,
« unir nos forces pour maintenir la paix et la sécurité internationales,
« accepter des principes et instituer des méthodes garantissant qu’il ne sera pas fait usage de la force des armes, sauf dans l’intérêt commun…/…
« réaliser la coopération internationale en résolvant les problèmes internationaux d’ordre économique, social, intellectuel ou humanitaire, en développant et en encourageant le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales pour tous, sans distinctions de race, de sexe, de langue ou de religion;
« être un centre où s’harmonisent les efforts des nations vers ces fins communes.
« [s’abstenir dans les ] relations internationales, de recourir à la menace ou à l’emploi de la force…»
2. Diagnostic et pronostic
Il n’est pas question de remettre en cause le principe et l’existence de l’ONU, car il faut bien un endroit où les 7 milliards d’humains et leurs 193 États membres puissent se rencontrer pour se concerter. Mais le bilan des Nations Unies est souvent contesté. Il faudra en proposer l’amélioration, plus particulièrement sur les points suivants :
2.1 L’ONU devrait étendre sa compétence et rechercher le consensus sur les sujets que les USA lui ont soustrait lorsqu’en 1948 ils s’opposèrent à la Charte de la Havane et privilégièrent la pérennisation des institutions de Bretton Woods qu’ils contrôlaient : ainsi des domaines primordiaux comme la monnaie (FMI), la finance (BM), le Commerce mondial (GATT/OMC) ne sont-ils pas de la compétence des Agences onusiennes, sans grand rôle de ce fait, comme la CNUCED (commerce et développement) ou l’ONUDI (industrie).
Le laisser aller monétaire et financiariste qui accable la planète (et l’économie de l’Europe et de la France) n’auraient jamais atteint cette délirante dérive dans un cadre davantage réfléchi et concerté par la communauté internationale, et non pas abandonné à Wall Street
D’ailleurs les USA ne sont pas disposés à se soumettre à une sorte de ”démocratie des nations” : ainsi quand l’Unesco (culture) adopte des mesures (adhésion de la Palestine) qui leur déplaisent ils cessent de verser leur contribution (22%) au budget de cette agence.
2.2 La gestion des crises et conflits armés est-elle bien réalisée par le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale ? Assez médiocrement en vérité. Mais -selon les dossiers- pas non plus dénuée de toute utilité. Si les Casques bleus parviennent parfois à empêcher le pire (mais pas toujours, comme en ex Yougoslavie ou au Darfour), leur action est souvent très insuffisante à ramener les conditions normales de fonctionnement d’un État sur un territoire (Liban, Nord Mali, Centrafrique…).
Le 27 mars 2014 l’Assemblée générale des Nations Unies a adopté une résolution dénonçant le référendum en Crimée sur le rattachement de la péninsule à la Russie, estimant qu’il n’avait aucune validité : au motif que le référendum qui s’est tenu dans la République autonome de Crimée et la ville de Sébastopol le 16 mars 2014, « n’étant pas autorisé par l’Ukraine … n’a aucune validité et ne saurait donc servir de fondement à une quelconque modification du statut de la République autonome et de Sébastopol.» On sait ce que les va-t-en guerre de l’OTAN en ont tiré comme conséquences dangereuses pour la paix en Europe.
A propos de la Syrie le secrétaire général de l’ONU M. Ban Ki-moon s’est déclaré (13 oct 2016) « consterné » par l’« escalade militaire épouvantable à Alep ». Il a précisé que « l’apparente utilisation systématique » d’engins incendiaires et de bombes particulièrement puissantes dans des zones habitées « pouvait constituer des crimes de guerre ».L’Union européenne a également dénoncé « une violation du droit humanitaire international ». La Russie a clairement été désignée comme la responsable de la reprise des combats dans un communiqué commun publié par l’UE, les États-Unis et les ministres des affaires étrangères de quatre pays de l’UE (France, Italie, Allemagne et Grande-Bretagne). On attend de voir si la réaction pour les actions de guerre de la coalition à Mossoul sera de la même intensité quand les civils commenceront à être victimes de l’offensive en cours.
2.3 Les Agences fonctionnent-elles bien ? Dépourvues de moyens financiers suffisants, leurs actions sont souvent d’une efficacité peu satisfaisante, car dépendant du bon vouloir des États.
Par ailleurs la politisation -qui fut extrême et désastreuse au temps de l’URSS et du Tiers mondisme radical- n’a pas totalement disparu au sein des Agences. Ainsi en 1995 lors de la conférence de l’ONU à Pékin des dispositions concernant le genre ont été ratifiées. (19. It is essential to design, implement and monitor, with the fullparticipation of women, effective, efficient and mutually reinforcing gender-sensitive policies… » )
Ainsi encore des positions strictement idéologiques ont été adoptées sur la question des migrants avec la fameuse thèse du ”remplacement des populations”.
Et par ailleurs USA, Chine, Israël contribuent de leur côté à cette politisation sur les questions du Turkestan oriental, du Tibet et de la Palestine. Sans parler du panel du Conseil des droits de l’homme présidé par ..un saoudien…
L’ONU est une bien belle et indispensable idée. Mais il ne faut pas qu’elle devienne un lieu de langue de bois, d’inefficacité, et d’hypocrisie.
Bon anniversaire l’ONU !