Comme le montrent les résultats d’admission aux concours du CAPES et de l’Agrégation tombés ces dernières heures, de très nombreux postes dans plusieurs disciplines (lettres classiques et modernes, mathématiques, anglais, allemand,…) ne seront pas pourvus, faute d’assez de candidats ayant le niveau minimum requis.
Plus largement, ce phénomène montre l’amplification de la crise des vocations à laquelle nous assistons depuis de nombreuses années et qui se traduit, entre autres, par la chute des inscriptions en master-enseignement. Amphis et salles de cours se sont vidés en une décennie. Plusieurs universités ont déjà dû renoncer à leur préparation et, à ce rythme, il n’y aura bientôt plus que quelques grandes universités qui prépareront les candidats. Nous sommes bien loin de l’égalité républicaine et de celle des territoires.
A cela, plusieurs raisons : salaires insuffisants, conditions d’exercice parfois catastrophiques, mutations douloureuses, manque de respect généralisé,…
La réforme du collège 2016 de Najat Vallaud-Belkacem et l’atteinte grave qu’elle porte à certaines disciplines (allemand, latin, grec,…) n’a évidemment rien fait pour arranger les choses.
Nous savons d’ores et déjà que l’objectif de 60 000 postes dans l’Education nationale que s’était fixé François Hollande au début de son quinquennat ne pourra mathématiquement plus être atteint. L’an prochain comme l’an dernier et les années d’avant, l’Education nationale sera contrainte de combler les manques criants en recourant à des contractuels dont beaucoup auront raté le concours et dont d’autres seront recrutés, sans aucune formation, à Pôle Emploi ou par petites annonces.
L’Ecole de la République et notre jeunesse méritent beaucoup mieux.
Outre l’abrogration de la réforme du collège 2016 et le retour aux dotations horaires perdues dans les matières sinistrées, en particulier l’allemand et le latin, nous proposons cinq mesures simples :
1°) l’instauration d’un concours à Bac + 1 ou Bac +2 assorti d’une bourse mensuelle égale au SMIC, et l’obtention a priori de l’écrit du CAPES, contre un engagement décennal à servir l’Education nationale. Il s’agit là, ni plus ni moins, que de rétablir les IPES (Instituts de Préparation aux Enseignements du Second degré) qui ont si bien fonctionné entre 1957 et 1979.
2°) l’augmentation significative du traitement de début de carrière des enseignants. L’Europe, qui sert de référence à tant de discours creux, devrait plutôt être prise ici en modèle. La grille salariale en France est l’une des plus basses de l’Europe occidentale. Un enseignant du secondaire en Allemagne, en Suisse ou au Luxembourg gagne ainsi plus du double qu’en France à niveau de compétences et ancienneté comparables !
3°) la réinvention de la formation des enseignants, en limitant la part théorique des « sciences de l’éducation » et en plaçant les nouveaux venus dans la carrière sous le patronage bienveillant d’enseignants expérimentés, dans un esprit de compagnonnage.
4°) le renversement complet des perspectives, en donnant systématiquement la priorité au nécessaire et aux savoirs complexes sur le superflu et le moins disant. Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement et c’est évidemment en maîtrisant totalement ce que l’on enseigne que l’on peut répondre le mieux aux questions et aux besoins des élèves.
Enfin 5°) le retour à des concours de recrutement qui portent de nouveau, quasi–exclusivement, sur la maîtrise des disciplines à enseigner.
Eric Anceau, responsable du projet pour la France et délégué national à la Cohésion nationale et à l’Instruction publique de DLF