Après un cru 2020 aux résultats exceptionnels (près de 96% d’admis !), le baccalauréat version 2021 promet lui aussi de battre des records d’admission. Et pourtant, toutes les études internationales le démontrent : le niveau des élèves français n’en finit pas de s’effondrer. Et la période du Covid aura au moins permis de mettre en lumière que cette précieuse institution du baccalauréat est en proie à la plus grande des menaces : sa dépréciation. Il y a de plus en plus de reçus à cet examen qui perd chaque année un peu plus de sa valeur.
Mais, pour le Ministre de l’Education nationale, l’urgence n’est pas de redonner au bac un peu de son lustre de jadis, il s’agit au contraire d’achever de le détruire, d’en finir avec ce qu’il lui reste d’à la fois prestigieux et égalitaire, son caractère national.
JM Blanquer vise à supprimer les épreuves finales du baccalauréat pour les remplacer par le contrôle continu ! Les moyennes des notes obtenues durant l’année décideront de l’obtention ou non du baccalauréat. Quelles sont les conséquences d’une telle réforme ?
Les professeurs vont être soumis à une pression nouvelle de la part des élèves, de leurs parents et de la hiérarchie. Si un professeur attribue des notes trop basses, alors il pourrait être considéré comme mauvais pédagogue ! Sachant qu’une évaluation doit se faire lorsque l’élève est suffisamment préparé, on imputera les éventuels mauvais résultats de ce dernier à une mauvaise préparation faite en classe. Aussi, pour éviter les mauvais procès, il sera recommandé aux enseignants de se montrer particulièrement « bienveillants » (cet adjectif étant le mot particulièrement à la mode dans l’Education nationale). Les proviseurs, soucieux de l’image de leur lycée, accentueront cette pression sur leurs professeurs pour justifier l’excellence de leur gestion.
Aujourd’hui, un 15/20 au baccalauréat a la même valeur dans les beaux quartiers de Paris qu’à La Courneuve ou à Aubervilliers. La réforme de Blanquer veut tuer le principe républicain d’un examen national garantissant sa neutralité par l’anonymat des candidats. Le baccalauréat deviendra un « examen maison », défavorisant encore plus les lycées se trouvant dans les zones dites sensibles. C’est un véritable abandon des catégories populaires, un enfermement dans une sociologie inexorable, une assignation à résidence socio-culturelle. Dis-moi où tu as passé ton bac, je te dirai ce qu’il vaut !
Cette réforme délétère ne s’attaque pas seulement aux modalités du baccalauréat. Elle attaque la République toute entière en remettant en cause le principe fondamental de l’examen national passé de façon anonyme.
Jean-Michel Blanquer s’est présenté à sa prise de fonction comme l’homme du redressement du niveau scolaire, le restaurateur de l’apprentissage des fondamentaux. Non seulement il a échoué mais il participe à la destruction de l’école de la République.
Le faux sauveur est un fossoyeur.
Olivier Weber
Délégué national à l’Instruction publique