Décidément avec les socialistes, les rapports fleurissent en automne. Après le rapport Gallois, voici donc le rapport Jospin. Avec le nom pompeux de commission de rénovation et de déontologie de la vie publique, Monsieur Jospin entend donc moraliser la vie politique. Dans ce rapport il y a du bon et du beaucoup moins bon.
Sur la méthode, on peut regretter les consultations très arbitraires de l'ancien Premier Ministre. Aucune réunion de travail publique ou audition. Monsieur Jospin s'est contenté de tête-à-têtes dans les salons feutrés. De plus les consultations ont été très parisiennes. Les élus locaux, premiers concernés par la réforme, n'ont pas été consultés comme ils auraient dû l'être.
Concernant les propositions, j’applaudis la recommandation d'instaurer une dose de proportionnelle. En même temps je reste sceptique, tant cette idée est l'arlésienne des réformes de la Ve République. Espérons que François Hollande tiendra pour une fois sa promesse de campagne, à la différence du traité TSCG, de la croissance ou de la TVA.
En revanche je serai bien moins laudateur sur le reste des propositions de la Commission Jospin. Certes, l'idée d'un parrainage citoyen pour l'élection présidentielle est séduisante sur la papier. Mais tous les spécialistes savent très bien qu'il sera extrêmement difficile de contrôler la validité de 150 000 signatures de citoyens. Cette proposition inapplicable est surtout un subterfuge pour ne pas changer le système des 500 parrainages d'élus. Si Monsieur Jospin avait pris la peine d'auditionner d'anciens candidats indépendants à la présidentielle comme moi, nous lui aurions expliqué que les parrainages d'élus devaient surtout redevenir anonymes, tel que le prévoyait l'esprit originel de la constitution.
Le reste des propositions est franchement inquiétant et est révélateur d'une tendance lourde chez les apparatchiks des grands partis : museler la démocratie française. Ainsi l’interdiction du cumul des mandats pour des élus de terrain va encore plus pervertir la fonction de parlementaire. Pour ma part, je cumule et j'en suis fier.
C'est la reconnaissance de mon travail de maire et la confiance de mes administrés qui me permettent d'être élu député. Je suis un des derniers élus indépendants à l'Assemblée nationale. Aux dernières élections législatives, j'ai gagné contre des candidats de tous les partis et notamment de l'UMP et du PS. Si j'ai réussi ce tour de force, c'est parce que mes administrés me connaissent. Sans cette légitimité populaire, nous allons encore aggraver le bipartisme et le poids des appareils politiques. L'investiture d'un des grands partis est déjà le Saint-Graal mais avec l'interdiction du cumul il risque de devenir la condition sine qua non pour être élu député ou sénateur. Le risque est d'avoir des députés couchés et aux ordres des chefs de parti. Les députés de l'UMP et du PS n'ont aucune liberté de parole et doivent voter en fonction d'instructions partisanes, sous peine de perdre leur précieuse investiture à la prochaine élection. On l'a encore vu avec le traité TSCG où beaucoup de députés socialistes ont dû avaler leur chapeau.
Parce que je cumule, je suis un député libre avec comme seule boussole l'intérêt du pays.
Par ailleurs il est quand même stupéfiant qu'une commission de déontologie de la vie publique ne trouve rien à redire au fait qu'un parlementaire puisse cumuler avec un poste dans un cabinet d'avocats d'affaires par exemple. Si vraiment le but de la commission Jospin avait été de moraliser la vie politique, elle aurait dû interdire à un parlementaire d'être payé par des lobbys. Pour ma part je fais la proposition qu'un parlementaire ne puisse percevoir aucune rémunération d'un tiers. De même en cas de cumul de deux mandats, je défends l'idée de l'interdiction du cumul des rémunérations. Voilà une vraie rénovation.
En fait le rêve de ces barons politiques est d'avoir des partis jumeaux (UMP et PS) avec des députés godillots. La proposition visant à restreindre le poids des communes rurales dans le vote aux sénatoriales au profit des conseillers régionaux en est encore la preuve.
A Debout la République, avec les centaines d'élus locaux qui sont dans nos rangs, nous serons vent debout contre cette tentative d'éradication des élus indépendants. Nous défendons l'expression d'idées différentes dans la démocratie française. Notre crédo : "Oui à la rénovation, non au verrouillage".
Nicolas Dupont-Aignan
Député de l'Essonne
Président de Debout la République