Ils ont raison. Dernièrement, deux syndicats d’agriculteurs ont su mobiliser leurs troupes pour une cause qui semble juste et bien réelle.
Ainsi depuis plusieurs mois, certains agriculteurs luttent non seulement contre les traités qui vont plomber inévitablement leurs activités mais également contre ce qu’ils ont décidé de nommer par « Agribashing » soit le dénigrement de leur métier. Et ce n’est pas facile d’autant qu’au sein même de la profession, ce terme est parfois contesté et présenté comme une invention « pour esquiver les sujets de fond » comme l’assure Brigitte Gothière, cofondatrice de l’association de défense des animaux soit L 214.
Sans entrer dans cette polémique, disons quand même que tout observateur, un brin avisé ne peut ignorer que la question agricole cristallise et agite : le débat omniprésent sur les différentes pratiques agricoles nous le rappelle ainsi que ………..le malheureux taux de suicide !
Aidés parfois par le cinéma (Roxane, Au nom de la Terre, Petit Paysan), quelques médias et certains réseaux sociaux mais surtout portés par le très connu Salon de l’Agriculture, les agriculteurs veulent et doivent se débarrasser de cette mauvaise image. La tâche risque d’être rude compte tenu des enjeux environnementaux, alimentaires et économiques.
Pour mémoire et pour aider leur cause, sans vouloir masquer la réalité d’une trop grande partie de l’agriculture aux mains d’un système mondialisé, gangrené par les multinationales de l’agro-alimentaire, il convient néanmoins de rappeler quelques données. Tout n’étant pas qu’évidence.
Après la seconde guerre mondiale et jusque fin des années 80, nous étions dans une agriculture dite de production. Les paysans devaient alors faire manger le pays, voire l’Europe, avec une méthode de travail encouragée à tous étage : écoles et chambres d’agriculture, agrochimie et banques au son du produire, produire toujours plus !….. Le libéralisme invasif s’affirmait alors que la société était encore investie par une économie familiale …décalage des mondes et pourtant les paysans ont su et dû s’adapter.
Puis fin des années 1980, début 1990, rupture brutale car l’agriculture de consommation s’impose avec un contrôle avisé des citoyens sur les méthodes de production. Pourquoi ?
En fait, le monde rural a changé, nos campagnes ont vu l’émergence de nouveaux regards sur l’espace rural : résidentiels, récréatifs en bien des points très différents du modèle imposé post guerre à nos agriculteurs … Alors, certainement, pour leur santé, comme pour la nôtre, il convient manifestement de changer de système de production.
Cependant, nous devons bien comprendre que l’innovation, les aides à la conversion, le mauvais marché, le manque de main d’œuvre, les contraintes législatives capricieuses et trop variées, le diktat européen … sont autant de chaînes que nos agriculteurs ne peuvent s’affranchir qu’avec un accompagnement sérieux et planifié dans le temps.
En fait, on demande à nos paysans –agriculteurs-cultivateurs d’être administrativement contorsionnistes, immédiatement adaptables aux météos du marché , consensuels aux volontés consuméristes et de faire allégeance totale aux normes des traités venus du Monde … cela fait parfois un peu beaucoup en si peu de temps pour une profession exposée trop régulièrement aux intempéries sanitaires et financières d’une économie aux bouffées délirantes qui, sur l’autel de la mondialisation, a déjà sacrifié son Industrie et qui s’apprête à en faire de même avec son Agriculture .
Xavier MONNAIS
Chargé de mission – Poitou-Charentes