Dominique Jamet, vice-président de Debout la France depuis 2012 mais également journaliste depuis… toujours tient chaque semaine sur le site de Debout la France une chronique où il commente très librement l’actualité politique.
« Jungle » inextricable de Calais, si étrangement impossible à extirper, aéroport-fantôme de Notre-Dame-des-Landes, en balance depuis un demi-siècle, marasme de notre agriculture, chômage de masse, stagnation puis recul de notre économie, faillite de notre système d’enseignement, paupérisation du pays, décomposition de la société, il n’est pas de question, insignifiante, mineure ou vitale, que ce gouvernement et sa majorité ne soient incapables de régler, il n’est pas de problème, petit, moyen ou grand, que notre classe politique ne laisse désormais s’envenimer, pourrir et finalement gangrener tout le corps social, il n’est pas d’urgence devant laquelle elle ne se dérobe en organisant et en laissant se perpétuer de faux débats.
La laïcité, pilier de notre République, est-elle en danger ? Le Parlement se perd dans d’interminables discussions sur la longueur, la largeur et la couleur du voile dont l’islamisme radical enveloppe les femmes, sur la composition des menus des cantines scolaires, et sur la définition des signes ostentatoires d’appartenance à telle ou telle religion. Notre société est-elle menacée de dislocation par l’extension des zones de non-droit, l’incapacité où elle est d’assimiler, d’intégrer, d’absorber des éléments hétérogènes ? On agite devant l’opinion comme un leurre destiné à détourner son attention et qui effectivement monopolisera les passions pendant plus d’un an, le projet dit de « mariage pour tous », banale prise en compte de l’évolution des mœurs et marginal élargissement du PACS. Le djihadisme étend-il son ombre sanglante sur notre sol ? Le pouvoir exécutif et le législatif s’embourbent dans une querelle byzantine autour de la déchéance de nationalité. La menace terroriste appelle-t-elle une réponse globale et déterminée ? L’état d’urgence, solennellement décrété, s’enlise dans des procédures qui le vident de son efficacité. Des millions de Français sont-ils sans emploi et sans espoir d’en retrouver un ? Faute de savoir comment relancer l’économie, la technocratie sort de ses tiroirs une réforme du Code du travail dont il apparaît très vite qu’elle va occuper toute la fin du quinquennat, qu’elle ne sera probablement pas adoptée, qu’elle n’entrera sûrement pas en application , et qu’en tout état de cause elle ne sera de nul effet sur la courbe du chômage.
On nous répète sans cesse que les Français ne supportent pas les réformes et que ce pays est ingouvernable. Il ne faudrait quand même pas inverser les choses, baptiser arbitrairement « réforme » ce qui n’est trop souvent que régression et imputer aux victimes les responsabilités qui pèsent sur les coupables. Au chevet d’un pays malade, les Diafoirus et les Purgon qui nous dirigent ne connaissent, ne pratiquent et n’ordonnent comme leurs lointains ancêtres que la diète, la purge et la saignée. Etonnez-vous après cela que le patient s’affaiblisse. La vérité est que nous sommes mal gouvernés depuis plus de vingt ans et que, ces derniers temps, nous ne sommes plus gouvernés du tout. La vérité est que, face à tout ce qu’on leur a fait subir, les Français ont fait preuve d’une extraordinaire patience et qu’aujourd’hui cette patience est à bout.
Le général de Gaulle, il y a soixante ans, avait relevé et restauré l’Etat tombé en quenouille, il avait remis debout la France. Entre les mains débiles de ses lointains successeurs, l’Etat s’est érodé, l’Etat s’est effrité, l’Etat s’est émietté, il n’en restera bientôt plus rien. La France, exsangue, est à genoux. De reculades en abandons, le libéralisme sans frein auquel se sont progressivement ralliés les deux partis du système, le fédéralisme rampant qui a transmis à des institutions supranationales, incompétentes et illégitimes le contrôle de nos frontières, la maîtrise de notre budget, l’évolution de notre économie a privé les gouvernements nationaux, dont le nôtre, des moyens de l’action, en auraient-ils l’intention. Mais comment ceux qui sont incapables de gérer la France d’aujourd’hui, également dépourvus de volonté, d’imagination et de vision seraient-ils capables de dessiner et de bâtir la France de demain ?
De passage dans un Salon où il a été brutalement confronté à la détresse et à la rage de nos agriculteurs, le chef de l’Etat a été conspué, insulté, traîné dans la boue et peu s’en fallut qu’il ne le fût dans la bouse. Image symbolique et navrante, au-delà de l’impopularité de l’homme, de l’abaissement de la fonction, et de l’avilissement de la République. Huer le président de la République est inacceptable, a commenté M. Stéphane Le Foll. Mais lorsque l’on n’est à la hauteur ni de la magistrature suprême que l’on a briguée ni des circonstances difficiles ou tragiques que nous traversons, lorsque l’on n’est qu’un ludion ballotté par les vagues de l’actualité, à quel accueil peut-on s’attendre ? Sommes-nous condamnés à être les spectateurs résignés, pendant les quatorze mois qui nous séparent encore de la fin lamentable d’un quinquennat calamiteux, à n’être que les spectateurs résignés du naufrage de l’Etat et de l’écroulement de la France ? Il est regrettable que notre Code n’ait prévu aucune peine pour non-assistance à patrie en danger.
Tout est à reconstruire.
Dominique Jamet
Vice-président de Debout La France