Jamet le dimanche !
Dimanche 13 décembre
ALTERNANCE, ALTERNANCE !
Dominique Jamet, vice-président de Debout la France depuis 2012 mais également journaliste depuis… toujours tient chaque semaine sur le site de Debout la France une chronique où il commente très librement l’actualité politique.
« Je suis la seule alternative crédible et fiable… », affirmait Nicolas Sarkozy dans une interview publiée par Le Figaro au lendemain du premier tour des régionales. Libre à M. Sarkozy de prendre ses désirs pour la réalité, ou de faire comme si, mais le président des Républicains suit de trop près et connaît trop bien les rapports de force politiques dans notre pays pour ignorer que le schéma auquel nous étions habitués et sur lequel il avait naguère bâti sa victoire n’a désormais plus cours.
Longtemps, M. Sarkozy s’est réjoui à l’idée d’affronter de nouveau M. Hollande en 2017. Fort de l’impopularité de son successeur, il était persuadé de n’en faire qu’une bouchée. De son côté, M. Hollande se faisait une fête à la perspective d’être de nouveau en compétition avec M. Sarkozy. Comptant sur la détestation qu’inspire son prédécesseur, il était convaincu de l’avaler tout cru. La campagne de chacun des deux adversaires était toute tracée. Plutôt que de dire : « Regardez-moi ! », ils se contenteraient de dire : « Regardez-le ! ». Plutôt que de dire : « Votez pour moi ! », ils se borneraient à dire : »Vote contre lui ! ». Le tour serait joué et la France, pour la quatrième fois de suite, aurait un président par défaut, un président qu’elle n’aurait pas choisi mais qu’elle subirait.
Les choses ont changé. L’alternative n’est plus réduite à deux termes, mais à trois au minimum. Si M. Sarkozy sort vainqueur de la primaire qui lui a été imposée par son propre camp en triomphant de ses challengers, ce qui n’est pas assuré, il n’est pas dit qu’il sera qualifié pour la finale, et il n’est pas dit que son adversaire sera M. Hollande. Si M. Hollande parvient à éviter une primaire de la gauche et ose se représenter en dépit de son échec retentissant sur le chômage et de ses engagements, ce qui n’est pas certain, il n’est pas dit qu’il sera présent au second tout et que son adversaire sera M. Sarkozy.
Qu’à cela ne tienne ! Ce n’est pas à deux vieux chevaux de retour qu’il est nécessaire d’apprendre le manège. Si le duel final oppose M. Sarkozy et M. Hollande, le premier revêtira les habits du représentant de la droite nationale et sécuritaire, défenseur des valeurs traditionnelles, le second enfilera le costume du porte-parole de la gauche humaniste et sociale, ennemi juré de la finance. Si l’autre finaliste a nom, par exemple, Marine Le Pen, M. Sarkozy, au cas où il serait encore là, fera appel à tous les républicains pour barrer la route à l’extrême-droite. A défaut, M. Hollande, dans l’hypothèse où il aurait franchi l’obstacle, cherchera à rassembler derrière lui tous les démocrates pour empêcher le retour de la bête immonde…
Tout cela, n’est-ce pas, a un air de déjà écrit, de déjà vu et laisse présager l’un de ces tours de passe-passe auxquels les deux hommes et ceux qui leur ont servi de modèles nous ont habitués. On se présente parce qu’on veut le pouvoir, dont on ne sait pas quoi faire, on l’obtient sur des promesses qu’on ne tient pas, car une fois qu’on l’exerce on ne sait pas quoi en faire, ou l’on fait le contraire de ce pourquoi on avait été élu, mais on se représente… Affligeant, n’est-ce pas ? Et pas besoin de chercher ailleurs que dans ces comportements, ces palinodies et l’éternel retour de la trahison et du reniement la raison de la désaffection et du dégoût de tant d’électeurs pour les élections – et les élus.
Le pire n’est pas toujours sûr.
Je ne sais pourquoi m’est revenu en mémoire la légendaire et gouailleuse réplique d’Arletty dans Hôtel du Nord : « Atmosphère ! Atmosphère ! Est-ce que j’ai une gueule d’atmosphère ? » Hollande-Sarkozy, Sarkozy-Hollande ? Nous ne sommes pas voués pour l’éternité à cette alternative entre Charybde et Scylla. Alternance, alternance, est-ce qu’ils ont toujours une gueule d’alternance ?
Le problème de M. Hollande et de M. Sarkozy n’est certes pas un problème de notoriété. Ce serait plutôt l’inverse. On ne se demande pas de quoi ces deux hommes sont capables. On le sait. Ni de quoi ils sont incapables. On le sait aussi. On les connaît. On les connaît même assez pour savoir qu’on les a assez vus.
Dominique Jamet