La situation égyptienne vient un peu plus, désormais, préoccuper les riverains de la Méditer-ranée. De la Syrie à l’Algérie, en passant par la Palestine, le Liban, la Libye et la Tunisie, le monde méditerranéen musulman est une nouvelle fois à feu et à sang. Depuis les origines historiques, et dans toutes ses dimensions géographiques et ethniques actuelles (et, par delà, du Pakistan et de l’Indonésie au Mali et au Nigéria), il est bien difficile de nommer un pays musulman qui connaitrait la paix et la démocratie. Ce constat ne doit pas désespérer les observateurs de la diplomatie française et européenne : il existe des forces démocratiques, sincères et courageuses, dans tous ces pays, qui finiront sans doute un jour par construire des nations sereines dans leur foi et leurs relations sociales.
Ces forces doivent être encouragées. Aidées. Mais il ne faut pas se tromper comme l’Europe et la France le font, depuis des mois à présent.
En Syrie, ce n’est pas parce que Assad emploie d’épouvantables méthodes de répression que ses opposants armés sont meilleurs et qu’ils sont les garants d’une promesse d’un pays pacifié et libre. Aider, voire armer, l’opposition armée à Assad est un pari imprudent et irréfléchi ; de surcroît, désormais, en passe d’être perdu. L’ennemi d’un « mauvais » n’est pas nécessairement « bon ».
Or, en Egypte, voilà que le même calcul est effectué par l’Europe et la France, toujours dans les fourgons des USA. Pourtant l’incompétence américaine sur le long terme en matière de Moyen Orient -qui crève les yeux- aurait dû alerter le Quai et Élysée.
Voici, à présent, que le Quai incite les Égyptiens à libérer Morsi, éphémère président destitué et incarcéré. Et stigmatise l’armée pour la sanglante répression qu’elle vient d’exercer. Là encore, qu’on ne s’y trompe pas ; que l’on ne parle pas de « sit in » d’une foule revendiquant l’élection de Morsi : l’armée et la police ont subi des tirs et déplorent une cinquantaine de morts par balle. Après des jours de demande de dispersion sans autre sanction.
Et ce sont des dizaines d’églises et de quartiers coptes (12 à 15 % de la population) qui ont subi les assauts des islamistes.
Certes Morsi avait été élu. Mais rapidement après son élection, diverses circonstances avaient excédé un peuple égyptien attendant le retour rapide à la normale :
- l’incapacité économique du Gouvernement (l’Egypte est dans la misère),
- son incapacité à rétablir la sécurité intérieure ( et donc le tourisme, essentiel pour la survie du pays)
- sa corruption,
- ses accointances avec les extrémistes, armés et agressifs,
- sa tentative de mettre fin à la brève démocratie tant espérée par la confiscation des pouvoirs judiciaires, garants de l’état de droit.
Manifestant, en apparence pour le respect de l’élection, les barbus du Caire entendaient bien, en réalité, s’en servir comme truchement pour confisquer la démocratie. Comme en Tunisie.
Dès lors la France doit, certes, appeler l’armée égyptienne à la retenue, puis à l’organisation rapide de nouvelles élections, mais elle ne doit pas oublier, dans son diagnostic, que le peuple égyptien rejette désormais, en grande majorité, les Frères musulmans, qui n’ont accédé au pouvoir que par défaut (contre un épigone de Moubarak).
Par dessus tout France ne doit pas oublier que sur tout son flanc sud, soit la moitié de son proche horizon géo stratégique, des ennemis pleins de haine à son encontre, rêvent de créer des bases, voire des régimes, pour l’attaquer directement, elle, ses ressortissants ou ses intérêts.
Il est urgent de cesser de se tromper lourdement. Il suffit, pour cela, de ne plus suivre les « stratèges » de Washington et de Bruxelles, et de retrouver une politique étrangère indépendante.
Henri Temple
Membre du Bureau national de DLR
Délégué national à l'Indépendance de la France