Pendant que les Français participaient à la fête de la musique dans la nuit du vendredi 21 au samedi 22 juin, l’une des catastrophes probables que nous annoncions dès février dernier dans la vidéo "Comment refonder l’école de la République" est arrivée au Sénat, à l’occasion du débat sur la loi sur l’enseignement supérieur et la recherche.
Un amendement « nocturne » a été adopté en catimini et à la hâte sur proposition du groupe Europe-Ecologie les Verts. La ministre Fioraso n’a émis, en la circonstance, qu’une protestation molle et sans effet. On peut d’ailleurs se demander, après l’avoir entendue, si la faiblesse de sa réplique est une nouvelle fois due à son amateurisme et à son incompétence ou s’il ne s’agit pas plutôt d’un plan ourdi de longue main. Est ici à l’œuvre ce monstre hybride de dérégulation et d’administration tatillonne, de fausses libertés et de vrai caporalisme, d’économies à la petite semaine et d’absence de contrôle sérieux des deniers publics, de démagogie et de cynisme que nous ne cessons de dénoncer. Un syndicat absolument pas représentatif des enseignants-chercheurs mais tout-puissant au ministère et Vincent Berger, rapporteur des Assises de l’enseignement supérieur et de la recherche connu pour avoir conduit l’Université qu’il préside au bord du gouffre financier, portent ici une lourde responsabilité.
De quoi s’agit-il ?
L’amendement adopté propose de supprimer le caractère national des qualifications des universitaires et d’amputer le Conseil national des Universités (CNU) de son principal rôle qui est de garantir le statut national et la qualité du recrutement des enseignants du supérieur.
Cela reviendrait d’abord à développer le localisme et le clientélisme sans contrôle. Un président d’université pourrait ainsi faire nommer professeur ou maître de conférences un ami politique, syndical ou un ami tout court. Finies l’égalité et la méritocratie républicaines ! Cela abaisserait ensuite inévitablement le niveau général et le rayonnement des Universités et, par voie de conséquence, ce seraient nos étudiants et le pays lui-même qui en pâtiraient.
Cela reviendrait enfin à ravaler les universitaires français, déjà moins reconnus et rétribués que dans la plupart des grandes démocraties, au rang de simples employés déconsidérés et soumis à l’arbitraire d’hyper-présidents, ce précisément contre quoi la ministre s’était engagée à lutter.
La nouvelle a été peu relayée par les médias et les autres partis n’ont pas ou peu réagi, soit en raison de leur embarras (EELV, PS), soit sans doute parce qu’ils n’ont pas mesuré l’importance de cette question.
Il en va autrement des universitaires. Nous avons reçu depuis hier plusieurs messages privés, y compris d’un ancien recteur et d’un haut responsable syndical de gauche, nous encourageant à agir parce qu’ils savent que nous n’avons pour seule ambition que de défendre l’intérêt général. Nous avons vu aussi, sur les réseaux sociaux, un professeur des Universités, par ailleurs élu des Verts, écrire qu’il avait honte de son propre parti et de la majorité à laquelle il appartenait.
A Debout la République, nous avons immédiatement rendu notre indignation publique et nous renouvelons ici notre protestation. Les parlementaires doivent avoir conscience qu’en votant ce texte en dernière lecture, ils prendraient la lourde responsabilité de la mort de l’Université française.
Eric Anceau
Membre du Bureau national de DLR
Délégué national à l’Assimilation et à la Cohésion nationale