Un ministre de l’intérieur connu pour tenir des discours de fermeté en matières de délinquance et d’immigration, la sécurité du quotidien et la maîtrise de l’immigration désignées comme chantiers prioritaires lors de la déclaration de politique générale, un ministre délégué à la sécurité du quotidien : le gouvernement Barnier envisagerait il d’agir réellement sur ces sujets ? Au regard des éléments de contexte, des premières annonces et de la manière dont s’engagent les discussions sur le budget pour 2025, nous ne pouvons qu’en douter .
Peut on réduire les dépenses publiques (donc les ressources des administrations) tout en conservant des « services publics de qualité » ? Les conséquences des mesures engagées dans le cadre de la RGPP durant les années Sarkozy ont démontré que ceci impliquerait en premier lieu des diagnostics précis, pour définir d’éventuelles marges de manœuvre, puis des investissements, pour réorganiser et créer les moyens permettant de faire évoluer les modes de fonctionnement . C’est une démarche incompatible avec un contexte d’urgence et la recherche d’économies immédiates.
Ainsi comment réduire les délais de procédure devant les tribunaux et construire les places de prison nécessaires à l’exécution des peines, quand le niveau du prochain budget pour la justice pourrait remettre en cause le plan de recrutement des magistrats et les projets de construction d’ établissements pénitentiaires, une situation qui conduit le nouveau garde des sceaux à menacer (déjà) de démissionner.
Et si le ministère de l’intérieur bénéficiait d’une hausse, celle-ci ne risquerait elle pas d’être utiliser pour régler des dépenses engagées en 2024 (des loyers impayés de locaux de gendarmerie) au lieu de permettre d’améliorer les conditions de fonctionnement de la police et de la gendarmerie ?
En matière de maîtrise de l’immigration, une part des annonces renvoie à des décisions de l’UE et des pays de départ. Mais est-il réaliste de demander à Frontex d’ assumer « son rôle premier » de garde frontière, alors que l’idéologie jusqu’à présent dominante dans l’Union Européenne veut que cet organisme veille prioritairement au respect des droits des migrants ?
Notons également que G.Darmanin a déjà tenté sans succès d’améliorer la coopération pour la délivrance des laissez-passer nécessaires aux rapatriement de personnes expulsées, générant une crise diplomatique avec l’Algérie en 2021.
.Allongement des délais de rétention, révision de la politique pénale des mineurs, exécution de courtes peines dans des établissements adaptés, ces annonces rejoignent des mesures que nous avions proposées avec Nicolas Dupont-Aignan. Leur concrétisation nécessite des évolutions législatives, notamment pour revenir sur l’aménagement par principe des peines de moins de 6 mois (loi du 23/03/2019). Mais compte tenu des clivages idéologiques attachés à ces sujets et de la composition actuelle de l’assemblée nationale, il est peu probable que les textes nécessaires puissent être votés.
Dans ce contexte les discours de ce gouvernement en matière de maîtrise de l’immigration et de sécurité relèvent principalement d’une communication visant à faire croire que ces sujets (préoccupations actuelles pour nombre de nos concitoyens) sont enfin pris en compte ; des gesticulations destinées à gagner du temps pour pouvoir passer le mistigri à d’éventuels successeurs.