C’était en 2002. Je préparais une vidéo pour la campagne présidentielle de Jean-Pierre Chevènement. Venu d’un bord éloigné de la galaxie politique, je ne le connaissais pas, mais je connaissais son nom. Il attendait patiemment son tour d’enregistrer.
Spontanément, voilà qu’il me parle de son formidable parcours de la France Libre au secrétariat aux affaires étrangères de Charles De Gaulle, de son action de terrain inlassable à la tête de la Mairie de Brive, de son refus de la droitisation du RPR dans les années soixante-dix où il avait lucidement anticipé qu’elle préparerait la liquidation du gaullisme par Jacques Chirac. Homme de pensée et non d’idéologie où de clan, il s’était allié à la gauche dans cette période avant de soutenir Jean-Pierre Chevènement, puis Nicolas Sarkozy en 2007. Je me suis souvenu plus tard l’avoir vu dans des meetings dominés par l’extrême-gauche où il n’hésitait pas à venir soutenir des causes qui lui semblait justes, pour s’y faire copieusement siffler.
Toute sa vie, la dimension sociale de ses convictions républicaines lui aura valu d’être marginalisé : trop à gauche dans le gaullisme affairiste des années soixante, trop républicain au sein d’une gauche qui préparait activement dans l’opposition son ralliement au néo-libéralisme une fois au pouvoir. Il n’était pas l’homme d’un « ni droite, ni gauche », il voulait la synthèse de ce qu’il y avait de meilleur de part et d’autre : l’effort de tous pour le progrès de tous. Je ne l’ai revu que brièvement par la suite, mais je n’ai jamais oublié son parcours de ténacité et de fidélité au service de ses convictions profondes. De là où il est parti depuis hier, peut-être sera-t-il heureux de savoir que j’ai gardé de notre rencontre une source d’inspiration pour le présent et le futur.
François MORVAN
Vice-Président de Debout la République