L’insécurité, l’immigration, la dette publique, la relocalisation industrielle, l’impuissance de la justice, la défaite de l’école, la reconstruction de l’hôpital… les défis qui se présentent à Emmanuel Macron sont toujours plus urgents et toujours plus nombreux !
Mais le seul défi qu’il ait eu l’idée de relever est celui qu’il a lancé aux deux « youtubers » McFly et Carlito lequel consistait à présenter le portrait des deux vidéastes rigolards lors d’une allocution présidentielle.
C’est ce que le Président de la République a fait lors de ses vœux de rentrée, adressés aux élèves, aux familles et aux enseignants, dans une vidéo postée sur son compte Twitter. « Enfin une promesse tenue ! » pourrait-on ironiser, si le propos présidentiel n’était pas si dérangeant, si outrageant.
Après avoir ouvert son robinet d’eau tiède, le Président Macron exhibe, sur un ton badin d’adolescent immature, un cadre contenant la photo des deux youtubers susnommés. La bonne blague pourrait s’arrêter là, mais le Président du « en même temps » a une passion perverse pour le mélange des genres. Et, alors qu’il sourit encore de la belle entorse qu’il vient de faire aux codes traditionnels de la communication politique, Emmanuel Macron lance, avec une légèreté incompréhensible, quelques mots à la mémoire de Samuel Paty, en continuant de manipuler fébrilement son cadre photographique.
Pas question, évidemment, pour le Président Macron d’avoir le courage de rappeler les circonstances atroces de la mort du professeur d’histoire-géographie, décapité par un islamiste tchétchène !
Pas question de mentionner l’abandon dont a été victime Samuel Paty de la part de sa hiérarchie (qui s’apprêtait à le sanctionner) alors que les menaces pleuvaient sur lui !
Pas question d’oser présenter le tableau inquiétant de la progression de l’islamisme au sein de l’école : dans telle école de Seine-Saint-Denis, la directrice se doit de recevoir un groupe de mères voilées scandalisées que leurs progénitures soient obligés écouter ou lire le conte « Les Trois petits cochons », jugé contraire à leur religion ; dans tel collège, un jeune professeur d’histoire-géographie fait cours avec le Coran sur le bureau pour justifier à tout moment que son enseignement n’est pas contraire au texte sacré (exemples tirés de l’ouvrage de JP Obin « Comment on a laissé l’islamisme pénétrer l’école », 2020). Pas question de parler du courage qu’il a fallu à Samuel Paty pour continuer à effectuer sa mission alors qu’il était menacé de mort !
Pas question de faire de vagues, pas question de parler des sujets sensibles, pas question de prendre la moindre décision courageuse, pas question d’incarner la fonction présidentielle !
Cette intervention de Macron relève du piétinement de la mémoire de Samuel Paty, martyr de l’islamisme le plus violent que le Président n’ose même pas nommer ! La seule photo qu’il était décent de tenir dans ses mains était celle de Samuel Paty ! Mais Emmanuel Macron ne vise qu’à l’abaissement de sa fonction, à la promotion de son égo, à l’auto-célébration dans l’inaction, à l’abandon des codes présidentiels, à la négation de la « common decency », chère à Orwell. Alors, entre un rappel des « gestes barrières » et un clin d’œil à McFly et Carlito, Macron évoque Samuel Paty. Pour ne rien dire, pour dire que tout se vaut, pour dire que -surtout !- il est inutile d’essayer de penser un événement si révélateur de la crise civilisationnelle que nous vivons.
Emmanuel Macron est « Heureux dans son carrosse, ce tout petit enfant » que décrit Jacques Prévert dans son poème « Fête foraine ».
Aussi, à la légèreté de l’hommage présidentiel, j’oppose les larmes qui ont coulé sur les joues de certains de mes collègues, en ce jour de rentrée, lorsque, en dehors de toute invitation ministérielle, nous avons évoqué le martyre de Samuel Paty, en salle des professeurs, dans le lycée où j’enseigne.
Nous sommes encore nombreux, enseignants de tous niveaux, à avoir une haute idée de la mission de service public que nous devons remplir. Avec sérieux, avec ténacité, avec la plus grande fierté qu’il y a à servir la France.
Pas sûr qu’Emmanuel Macron puisse comprendre cela.
Olivier Weber
Délégué national à l’Instruction publique