La loi N°2019-222 du 23 mars 2019 dite de programmation 2018-2022 et de réforme pour la Justice bouscule les différentes matières du droit : pénale, sociale, civile, procédure civile.
Il y a un an cette réforme a réussi le tour de force de réunir dans la rue à la fois les avocats et les magistrats. Comment s’en étonner : cette réforme est passée en force dans le plus pur style MACRON : mal pensée, mal préparée, peu discutée.
La mesure phare de la réforme est l’absorption du Tribunal d’Instance -TI- par le Tribunal de Grande Instance -TGI- pour former le TRIBUNAL JUDICIAIRE.
Cela est vrai bien entendu dans les communes où existent TGI et TI ; à défaut de TGI le TI subsiste.
Les différents tribunaux d’instance du Département pourront se répartir les contentieux techniques (dossiers de surendettement par exemple) faisant craindre un transfer progressif des dossiers des petits tribunaux vers les plus grands et donc, à terme, la disparition de certains tribunaux et par conséquent une nouvelle aggravation de la désertification de nos territoires.
Autre crainte : une privatisation de la justice.
En effet tout litige inférieur à 5.000€ obligera le justiciable à passer par la conciliation ou la médiation avec l’aide de services privés.
Sur le plan pénal les mesures vont de la possibilité de déposer plainte en ligne jusqu’à la création d’un Tribunal Criminel Départemental qui se situerait entre le Tribunal Correctionnel et la Cour d’Assises qui aura vocation à juger essentiellement les crimes allant jusqu’à 20 ans de réclusion.
Ce Tribunal ne sera plus composé de jury populaire mais de 5 Magistrats professionnels.
Toujours sur le plan pénal les techniques spéciales d’enquête (écoutes téléphoniques, géolocalisation) ne dépendront plus du juge d’instruction mais désormais du Parquet. Par conséquent certains commentateurs ont pu parler de régression des libertés.
« En même temps « chacun aura bien compris que cette réforme se veut un palliatif à l’encombrement des tribunaux , faute ( depuis des décennies) de se donner les moyens d’une ambitieuse politique pour la Justice.
Il est « annoncé » par le Gouvernement une hausse du budget de la Justice qui passerait de 6,7 milliards en 2017 à 8,3 milliards en 2022…
Enfin la dématérialisation fait dire également à de nombreux professionnels que l’on s’oriente vers une Justice déshumanisée où dans certains cas le numérique remplacera le contact avec le magistrat.
Une fois de plus en confondant vitesse et précipitation, le Gouvernement est dans l’obligation de différer certains aspects de la réforme (la nouvelle réforme du divorce devait entrer en application au 1er janvier : elle est repoussée au 1er septembre).
Compte tenu des très nombreux décrets d’application qui seront à prendre, c’est un air de « déjà vu » qui attend le justiciable à l’image des futurs retraités.
François Kohn
Délégué national aux activités socio-professionnelles