A son tour le Conseil économique, social et environnemental s’est saisi du sujet de la dépendance des personnes âgées. On pourrait presque dire « enfin » parce que s’il est un sujet sur lequel on pourrait attendre quelque chose de ses travaux, c’est bien celui-là.
Il en est ressorti l’habituelle motion hyper-consensualiste que produit ce genre d’organisme (il faudrait…, on regrette que…, on ne peut qu’inviter le Gouvernement à…), toutefois complétée par le douloureux rappel de l’urgence de la situation, perceptible notamment au travers de la grave crise que connaissent les institutions d’hébergement pour personnes âgées et, plus largement, l’ensemble du secteur de la prise en charge de la dépendance. Quelques chiffres suffisent à résumer cette urgence : on doit s’attendre au triplement, dans les trois décennies à venir, du nombre de nos concitoyens de plus de 85 ans.
C’est un défi absolument considérable, où entrent effectivement en jeu des principes fondamentaux : celui de la nécessaire solidarité nationale, à qui il incombe (et qui est seule en mesure) de relever ce défi majeur ; celui de l’égalité du traitement des effets de la dépendance, notamment du point de vue territorial ; celui de la construction d’une politique publique par le vote d’une grande loi pluriannuelle de programmation pour l’autonomie, comme Nicolas Dupont-Aignan l’avait proposé pendant la campagne pour la dernière élection présidentielle.
Il est peut-être intéressant, comme le suggère le CESE « d’appeler le Gouvernement à ouvrir sans tarder un large débat public ». Mais il est encore plus urgent d’agir, et d’agir vite. On attend donc d’Emmanuel Macron et du Gouvernement qu’ils mettent en œuvre la promesse du candidat Macron: « C’est un nouveau risque qu’il nous faut construire ». Le problème est qu’on n’en prend guère le chemin. Entre les tergiversations brouillonnes ou les ballons d’essai lancés sur une deuxième journée de solidarité et l’évocation pusillanime d’une énième réforme, on perd de vue l’essentiel : il y a à l’évidence une question de moyens insuffisants, doublée d’une mauvaise affectation de moyens entre des secteurs étanches et cloisonnés, à l’origine de rigidités dans la prise en charge des personnes âgées dépendantes. C’est ce que Nicolas Dupont-Aignan a souligné dans la lettre qu’il a envoyée aux professionnels de santé et d’encadrement des EHPAD le 14 mars dernier pour les soutenir dans leur mouvement. Trop de transferts inutiles entre Ehpad et hôpitaux et des moyens inadaptés là où l’on en a besoin.
Ce n’est certainement pas en imposant aux seuls salariés la brimade d’une nouvelle journée travaillée non payée, d’ailleurs sans rapport avec les nécessités du financement de la dépendance, qu’on pourra résoudre le problème. Il faut au contraire se pencher sérieusement sur la création d’un cinquième risque, celui de la dépendance, au même titre que la maladie, la famille, les accidents du travail et la vieillesse et sur l’instauration, en corollaire, d’une vraie prestation-autonomie, compensant réellement la dépendance, dont le financement doit être basée sur la solidarité nationale et dont la gestion pourra être confiée aux départements.
Mais cela nécessite de la volonté et du courage.
Benoit Dolle
Délégué National DLF à la dépendance